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Identité numérique : maîtrisez son côté obscur !

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Qu’est ce que l’identité numérique ?

L’identité numérique est composée de tous les éléments qui nous concernent sur internet : il peut s’agir de signatures électroniques, de pseudonymes utilisés sur des forums, de commentaires et avis publiés sur des sites commerçants, de photos sur Facebook, de curriculum vitae en ligne, etc… Toutes ces bribes d’information caractérisent l’internaute puisque ses habitudes, ses goûts, sa situation personnelle ou professionnelle sont facilement décelables. Certains sites peu scrupuleux se servent d’ailleurs de notre identité numérique pour nous proposer dans leurs publicités des produits adaptés à notre mode de consommation, Internet ne demandant qu’à livrer l’identité numérique que nous avons, parfois sans le vouloir, un peu trop dévoilée. Blogs, paiements en ligne, réseaux sociaux, sites de partage de vidéos, tels sont les grands créateurs de notre identité numérique. Quand bien même vous feriez en sorte de ne pas exhiber votre vie privée, sachez que votre adresse IP, celle-là même qui vous permet de surfer sur internet, fait partie de vos coordonnées numériques. Des coordonnées facilement récupérables, tout comme votre adresse e-mail ou encore votre numéro de portable. L’identité numérique est ainsi omniprésente, son étendue n’a de frontières que celles d’Internet : si vos informations se propagent à la vitesse de l’éclair, qu’en sera-t-il d’éventuelles rumeurs ou de fausses allégations à votre sujet ? Alors que l’identité civile est donnée à la naissance par l’Etat, l’identité numérique nécessite désormais une gestion dès le berceau…

Ci-dessus le shéma des différents « visages » de votre identité numérique : coordonnées, avis, culture…
Source : fredcavazza.net

De l’existence d’une morale virtuelle

Tout comme il existe une éthique des affaires, une éthique environnementale ou encore déontologique, on ne peut ignorer l’apparition d’une éthique de l’informatique, sorte de morale virtuelle applicable aux internautes et par eux sur l’ensemble du Web.  Exemple le plus frappant, l’application de la « netiquette », l’ensemble des règles de savoir vivre que les utilisateurs de forums ou encore les diffuseurs de mailing list doivent respecter. Cette charte virtuelle prévue par la majorité des sites définit en effet les règles de politesse et de respect auxquelles les internautes sont soumis, tant dans la forme que dans le fond des messages publiés, et sous peine de se voir sanctionné par les administrateurs ou webmasters. Plutôt rassurant donc, les messages  pouvant nuire à la réputation virtuelle et à l’identité numérique d’une personne ne sont généralement pas tolérés et sont rapidement supprimés dans les groupes de discussion, grâce à une forme d’autocontrôle des utilisateurs et une vigilance accrue des responsables. En effet, si le droit français n’a pas complètement encadré l’identité numérique, il n’en reste pas moins que des lois comme celle de 1881 sur les délits de presse sont tout à fait applicables aux nouveaux moyens de communication, la diffamation et les injures pouvant en effet être sanctionnées pénalement dès lors qu’elles sont commises sur Internet. L’écran-bouclier qui offrait une supposée protection aux personnes mal intentionnées a tendance à se fissurer…

Les limites légales au choix et à l’utilisation d’un pseudo

Les pseudonymes remontent à la nuit des temps et l’on pense souvent, à tort, que les personnes les plus concernées sont les journalistes, artistes ou écrivains. Mais avec le développement d’Internet, c’est une communauté entière d’utilisateurs qui s’est vue offrir la possibilité de publier toutes sortes de textes et pensées sous un « pseudo ». Celui-ci permet en effet de se connecter sur des forums, des chats ou des blogs en gardant un certain anonymat. Qu’il s’agisse d’un prénom orthographié différemment, d’une expression amusante, ou d’un sobriquet suivi d’un numéro de département type « Zouzou92 », le pseudo fait partie intégrante de notre identité numérique. Pourtant, dans la vie réelle comme sur Internet, l’utilisation d’un pseudonyme n’est pas véritablement encadrée légalement. Néanmoins, la seule limite posée par la jurisprudence concerne le comportement frauduleux : celui qui utilisera un pseudonyme et portera atteinte aux droits des tiers pourra se voir sanctionné. Autre limite, le contrôle opéré par les webmasters sur les pseudos lors de l’inscription sur les sites. On relève souvent, dans les chartes des forums et chats, des passages prévoyant l’interdiction de pseudos violant le droit des marques ou de la propriété intellectuelle, ou à caractère violent, voire raciste. Enfin, les conflits entre noms de domaine et pseudonymes sont nombreux et se résolvent bien souvent par des procédures alternatives de règlement des litiges : plutôt que d’assigner en justice une personne ayant frauduleusement utilisé un pseudonyme lors de l’enregistrement d’un nom de domaine, le titulaire de droits pourra recourir à des procédures devant des organismes spéciaux tels que l’OMPI, l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, ou encore l’AFNIC, l’Association Française pour le Nommage Internet en Coopération.

Un droit à l’anonymat sur internet ?

Beaucoup d’internautes revendiquent un droit à l’anonymat sur la toile. Et pour cause, comme nous avons pu le constater, il est dorénavant enfantin de tracer quelqu’un sur la toile pour déterminer son identité numérique. Protégé par l’article 9 du Code Civil dans le cadre du droit au respect de la vie privée, le droit à l’anonymat est également visé par des lois telles que la Loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978. Néanmoins, si la reconnaissance d’un tel droit permet d’écarter d’éventuels systèmes de surveillance de type Big Brother, elle peut faciliter la commission d’actes criminels sur le réseau en protégeant les pirates et autres « criminautes » malveillants.  On observe ainsi aujourd’hui une tendance à l’identification systématique, les FAI ayant d’ailleurs pu se voir imposer par un décret du 24 mars 2006 l’obligation de conserver toutes les données de connexion des internautes dans un délai d’un an. La solution ne serait-elle pas de trouver un équilibre entre la conservation de l’anonymat face aux inconnus et la nécessaire identification dans le cadre de la sécurité publique ? Belle utopie…

Ce célèbre dessin de Peter Steiner publié dans le journal New Yorker en 1993 mettait l’accent sur l’anonymat offert à l’époque par Internet. Les choses ont bien changé…

Et si l’on gérait votre réputation numérique…

L’existence de l’identité numérique étant définitivement reconnue, des entreprises vous proposent désormais de gérer votre web-réputation ! Ce secteur d’activité se développe depuis environ deux ans, et la plupart des services fournis concernent la surveillance et l’effacement des traces laissées sur Internet, partant du constat selon lequel l’identité numérique d’un individu est créée par lui, mais également par ce que les autres disent de lui. Le site américain ReputationDefender ou l’anglais Garlik sont donc considérés comme des sentinelles capables de rechercher l’état de votre réputation virtuelle et de l’améliorer, en demandant par exemple aux sites d’effacer des contenus négatifs sur vous. D’autres concepts comme les fournisseurs d’identité OpenID ont également vu le jour, et vous permettent de ne vous inscrire et vous connecter sur plusieurs sites qu’avec une seule identité. Au lieu de créer un nouveau compte sur chaque nouveau site, l’internaute crée un identifiant unique chez un fournisseur OpenID. Il pourra alors se connecter directement avec son OpenID sur les sites concernés. Autrement dit, votre idée est gérée et centralisée par une société privée. Nous voilà rassurés…

Une loi contre l’usurpation de l’identité numérique

Phénomène prenant de plus en plus d’ampleur, l’usurpation d’identité numérique ne fait toujours pas aujourd’hui l’objet d’un texte spécifique et les dispositions existantes restent incomplètes. L’article 434-23 du Code pénal prévoit en effet le délit d’usurpation d’identité, mais d’autres actes incriminés doivent être réalisés pour que cette disposition s’applique. Pour cette raison, le projet de loi LOPPSI 2, qui sera discuté à l’automne 2009, pourrait modifier l’article 222-16-1 du Code Pénal en ces termes : ” Le fait d’utiliser, de manière réitérée, sur un réseau de communication électronique l’identité d’un tiers ou des données qui lui sont personnelles, en vue de troubler la tranquilité de cette personne ou d’autrui, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Est puni de la même peine [la réalisation de ces actes] en vue de porter atteinte à son honneur ou à sa considération“. Cette volonté politique de protéger l’identité numérique a d’ailleurs été dévoilée dans le plan « France Numérique 2012 », bien que l’identité numérique ne fasse pas partie de l’identité juridique de l’individu. Le réveil tardif du législateur montre combien la France est à la traîne en matière de lutte contre l’usurpation d’identité numérique. Les Etats Unis punissent par exemple ce délit depuis 2005. Plus strict encore, le Maroc, qui a condamné un individu à 3 ans d’emprisonnement pour avoir créé le profil Facebook du frère du Roi Mohammed VI à son insu ! Pour la petite histoire, l’usurpateur a été gracié un mois après son incarcération. Tant qu’il ne s’agit pas d’une libération virtuelle…

La France souhaite rattraper son retard en matière de protection de l’identité numérique, et ce en pénalisant son usurpation.
Source : nsae.fr

Protégez-vous contre vous-même !

Si vous souhaitez protéger vous-même votre identité numérique, sachez que la tâche est lourde, mais pourtant réalisable. Pour commencer, installez un bon antivirus et un pare-feu performant sur tous vos ordinateurs, vous réduirez ainsi de 99% les risques d’usurpation d’identité numérique. Ensuite, si vous avez pour habitude de publier vos impressions sur divers produits ou sur des forums, utilisez toujours le même pseudonyme, et faites en sorte qu’il soit facilement identifiable. Par ailleurs, n’hésitez pas à contacter les sites hébergeant des contenus nuisibles à votre image virtuelle, voire à demander à Google de désindexer ces sites du moteur de recherche. Vous pouvez également enregistrer en .fr et en .com votre nom de domaine avec vos vrais noms et prénoms, quand bien même vous n’auriez pas encore de site à proposer. Enfin, pour les utilisateurs de Facebook, vérifiez régulièrement la publication de photos de vous et les commentaires que vos contacts pourraient laisser sur votre profil. Un mot d’ordre : restez vigilants !

Caroline LAVERDET, juriste en Droit des Nouvelles Technologies


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